
Les dernières
Tribus Indiennes
insoumises aux États-Unis.
Une des rares tribus indiennes qui végètent
encore aux États-Unis oppose en ce moment au Gouvernement de
Washington une résistance qui pourrait bien entraîner
sa perte.
Il y a une année, environ, cette tribu qui a donné son
nom à l'Utah, quittait brusquement les territoires qui lui
avaient été assignés obligatoirement dans ce
dernier État, et, traversant le Colorado et le Wyoming, allait
se fixer dans la région des Collines-Noires du Dakota méridional.
Elle refuse aujourd'hui de réintégrer son État
et répond aux sommations par un véritable défi
au Gouvernement américain. Les Utes se plaignent en particulier
de la réduction qu'ont subie les fournitures de vivres qu'ils
reçoivent du Gouvernement fédéral et de l'internement
de leurs enfants dans une école alimentaire sise à 5o
kilomètres de leur habitation actuelle.
La réponse des autorités ne s'est pas fait attendre
les troupes fédérales viennent d'être envoyées
dans le Dakota méridional.
En présence de l'attitude des Indiens, deux courants d'opinion
absolument contraires se sont dessinés dans le public éclairé
des États-Unis; il y a, on le devine, les partisans de la douceur
et les partisans de la manière forte.
Les premiers ont à leur tête le capitaine Carter P. Johnson,
qui s'est fait aimer et respecter des Indiens pendant les trente années
qu'il a été en relations avec eux, comme commissaire
des Affaires indiennes. Dans un rapport qu'il a adressé au
Département de la Guerre,. à Washington, il dépeint
les Utes comme de pauvres affamés, aigris par les injustices
de toutes sortes qu'on leur a fait subir. La présence des troupes
ne fera - dit-il - que les exaspérer: tout cela finira par
une large effusion de sang où ces malheureux seront décimés,
peut-être anéantis ; est-ce là ce que veut le
Gouvernement?
Le capitaine P. Johnson pense qu'il suffirait de fournir à
la tribu les vivres qu'elle recevait en ces dernières années,
sans lésiner sur cette maigre aumône, et de rapprocher
d'elle l'habitation des enfants pour l'amener à de meilleurs
sentiments. Déjà, les Utes avaient promis d'accepter,
à ces deux conditions, les mêmes règlements que
ceux auxquels obéissent les Sioux, lorsque l'arrivée
des troupes les a révoltés.
Par contre, le commissaire actuel des Affaires indiennes, M. Francis
E. Zeupp, et la plupart des militaires, représentent les Utes
comme des fainéants, qui ont refusé de prendre part
aux constructions de voies ferrées et autres travaux qu'on
leur a proposés. Ils préfèrent vivre de mendicité.
De l'avis de ces partisans de la force, il faut en finir par la répression
plus on montrera de fermeté, plus vite on les réduira,
pour leur propre bien, à vivre de la vie des citoyens américains,
que tant d'autres Peaux-Rouges ont consenti à adopter depuis
un demi-siècle.
C'est à n'en pas douter la raison du plus fort qui triomphera.
Les Utes, comme les Danois du Sleswig et les Polonais, n'ont qu'à
se soumettre, étant une infime minorité.